En octobre 2021, le premier tome du Livre blanc était publié. Il documentait les actions déjà existantes et l’état de la mixité sociale au sein des écoles du Groupe INSA. Le second tome préconisera des actions à mettre en œuvre au sein du Groupe. Pourquoi publier ce document intermédiaire ?


Le travail que nous menons depuis bientôt deux ans au sein de l’Institut Gaston Berger – service commun du Groupe INSA dédié à l’ouverture à toutes les diversités – a pour ambition de proposer des actions qui pourraient être déployées au sein des instituts pour renouer avec le modèle social originel INSA.

Pour nourrir notre réflexion et bâtir nos propositions, nous avons analysé des données chiffrées, opéré un benchmarking, sommes allés à la rencontre des acteurs de terrain, avons mené des entretiens avec des experts et nous sommes appuyés sur les principales références théoriques issues des recherches en sciences de l’éducation.

Ce document intermédiaire, publié entre les deux tomes du Livre blanc, mobilise de nombreux éléments de littérature académique. L’idée est que ces références puissent nourrir les débats internes et servir à approfondir les réflexions sur la rénovation du modèle social INSA.

De plus, les décisions politiques en matière éducative me semblent parfois décorrélées des résultats éprouvés des recherches scientifiques. À notre échelle, nous tentons de dépasser cette opposition et de nous appuyer sur les savoirs accumulés depuis une soixantaine d’années pour imaginer des solutions innovantes et/ou ayant fait leurs preuves. C’est pourquoi nous accordons également une place très importante à l’évaluation et aux impacts potentiels des actions qui pourraient être effectivement mises en œuvre, dans une démarche de recherche-action.

La littérature scientifique sur le sujet est très riche et peut être très clivante entre différents courants de pensée. Comment avez-vous opéré vos choix ?


Il est important de rappeler que ce travail est nécessairement non exhaustif. Ce document est particulièrement centré sur les inégalités liées à l’origine sociale, qui sont très marquées dans le système éducatif français. Mais il explore également celles liées au genre, à l’origine culturelle et migratoire et aux disparités territoriales.

Sur cette question des inégalités sociales à l’école, nous pouvons effectivement évoquer différents courants de pensée. C’est une problématique très complexe car les inégalités peuvent recouvrir différentes formes. Les chercheuses et chercheurs ne se centrent pas exactement sur les mêmes objets d’études et n’emploient pas toutes et tous les mêmes méthodologies de recherche.

Nous avons donc tenté de dresser un panorama de ces grands courants de pensée puis de nous en affranchir pour présenter les principales pistes explicatives des inégalités scolaires, sans accorder une importance primordiale à l’un de ces courants. Les oppositions sont parfois sémantiques et servent à nourrir les débats mais rappelons que ces approches sont complémentaires et permettent d’affiner notre compréhension des processus conduisant aux inégalités scolaires.

Comment résumeriez-vous, au vu des travaux que vous menez au sein de l’Institut Gaston Berger depuis deux ans, l’état des inégalités scolaires aujourd’hui, en France ?


Les éléments historiques présentés permettent de mieux comprendre la structuration actuelle de notre système éducatif. Durant les deux derniers siècles, de grandes lois ont permis d’atteindre une forme d’ « égalité formelle » juridique, au sens où aucun jeune n’est légalement privé d’une éducation publique. Pour autant, en dépit de débats sur la « démocratisation » potentielle du système éducatif, les sociologues sont unanimes sur un point : les inégalités sociales à l’école se sont recomposées mais restent très marquées en France. Les enquêtes internationales confirment d’ailleurs ce constat.

Il semblerait également que l’ampleur des inégalités sociales à l’école et la pluralité de leurs causes invitent à une discussion sur l’idéal méritocratique de notre système éducatif. C’est une « fiction nécessaire », pour reprendre une expression de François Dubet, mais qui ne se concrétise que trop rarement et pose de nombreuses questions quant à la justice et à l’équité d’un système qui exclut en réalité une grande partie des jeunes issus de milieux moins favorisés. 

Nous sommes finalement convaincus que l’action contre ces inégalités systémiques devrait être organisée à tous les niveaux du système éducatif. Chaque établissement du supérieur a pourtant un rôle à jouer dans leur réduction concrète. Mais pour cela, il est grand temps de passer à l’action, de manière volontariste, déterminée et en se servant des connaissances accumulées. La littérature académique doit servir cet objectif ambitieux et inspirer notre action, au quotidien et sur le plus long terme.

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